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XIXème siècle : liens avec d'autres phénomènes naturels et dispositifs de simulations

À partir de 1818, François Arago (1786-1853) astronome, physicien et homme politique français, débuta des travaux portant sur les orages magnétiques. Il démontra que ceux-ci avaient un lien avec les taches solaires et avec les étincelles électriques. Il collabora avec le physicien Jean-Baptiste Biot (1774-1862) pour travailler sur la conduction thermique. Biot étudia les aurores en 1817, notamment dans les îles Shetland et en Ecosse. Il montra que la lumière des aurores n'étaient pas polarisée et donc ne pouvaient pas être issue d’une quelconque réflexion.

 

Alexander Humboldt (1769-1859), proposa une description objective des aurores : « De ce phénomène, il résulte que la Terre émet une lumière distincte de celle que lui envoie le Soleil. L’intensité de cette lumière surpasse un peu celle du premier quartier de la lune ; parfois elle est assez forte pour permettre de lire des caractères imprimés, son émission, qui ne s’interrompt presque jamais vers les pôles, nous rappelle la lumière de Venus, dont la partie éclairée par le Soleil brille souvent d’une faible lueur phosphorescente. Peut-être d’autres planètes possèdent-elles aussi une lumière née de leur propre substance. Il y a dans notre Atmosphère d’autres exemples de cette production de lumière terrestre. Tels sont les fameux brouillards secs de 1783 et de 1831, qui émettaient une lumière très sensible pendant la nuit ; tels sont ces grands nuages brillant d’une lumière calme ; telle est enfin cette lumière diffuse qui guide nos pas au milieu des nuits d’automne et de printemps, alors que les nuages cachent les étoiles et que la neige ne couvre point la Terre Â».

En plus d’avoir écrit des descriptions fidèles à la réalité, Humboldt fut le directeur d’une étude magnétique. Avec les données qu’il obtint (venant du monde entier), il rédigea un ouvrage, Kosmos, dans lequel il montra le lien entre les aurores polaires et les orages magnétiques. Il fut également le premier à penser que les aurores pouvaient exister ailleurs dans notre Système Solaire.

 

De 1838 à 1839, la frégate La Recherche au Spitzberg effectue un voyage durant lequel les scientifiques vont confirmer le lien entre l’activité des aurores et les perturbations magnétiques :

« Quelques indications suffiront pour prouver la nature électromagnétique de l’aurore boréale. Au Spitzberg, une aiguille aimantée suspendue horizontalement à un fil de soie non tordu est tournée vers l’Ouest : dès le début de l’aurore, le physicien qui observe cette aiguille s’aperçoit qu’au lieu d’être sensiblement immobile, elle semble en proie à une inquiétude inusitée et se déplace rapidement à droite et à gauche, et de la gauche vers la droite. […] Enfin quand la couronne boréale se forme, son centre se trouve précisément sur le prolongement d’une aiguille magnétique librement suspendue sur une chape et orientée dans le sens du méridien magnétique ; elle n’est point horizontale, mais inclinée vers le pôle magnétique et se nomme aiguille d’inclinaison. Les aurores boréales sont donc intimement unies aux phénomènes magnétiques du globe terrestre Â».

Cette expédition eu aussi un grand apport artistique car de nombreuses gravures, comme celle ci-dessus, furent réalisées lors de cette expédition.

 

Peter Barlow (1776-1862) fut le premier à remarquer les courants électriques spontanés, observés dans les fils du télégraphe électrique. Il écrit en 1849 : « Le soir du 19 mars 1847, une brillante aurore était visible ; pendant toute sa période de visibilité, de fortes déviations alternatives se manifestaient sur tous les instruments. Des effets semblables sont également observés sur les télégraphes et sur plusieurs autres lignes de chemin de fer Â». En effet, le courant émit lors des perturbations magnétiques pouvait dominer le courant normal utilisé par les télégraphes et, ce faisant, rendait la transmission de messages impossible.

 

En utilisant des récits d’explorateurs en Arctique, le géographe Munckle met en évidence, en 1833, l’existence de l’ovale auroral : une zone ovale dans laquelle la fréquence d’apparition des aurores est élevée. Elias Loomis (1811-1889), professeur à l’université de Yale réalise les premiers croquis de l’ovale en 1860. Son travail sera reprit par le scientifique allemand Hermann Fritz (1830-1883), qui établira un catalogue des aurores recensées en 1870 puis une carte en 1881.

 

En 1844, l’astronome allemand Heinrich Schwabe (1789-1875) mit en évidence le cycle des taches solaires. Il remarqua que les variations magnétiques sur Terre augmentaient, avec des perturbations plus fréquentes, lors des maximums des cycles des taches solaires. Ce travail fut complété en 1852 lorsque Rudolf Wolfe, Sabine et Gauthier, trois chercheurs Suisses et Anglais, démontrèrent que les perturbations magnétiques terrestres étaient synchronisées avec l’apparition des taches solaires et donc par conséquent des aurores polaires.

Un physicien suédois nommé Angström (1814-1874) étudia le spectre des aurores boréales, et ses déductions lui permirent de confirmer les résultats obtenus précédemment par Rudolf Wolfe, Sabine et Gauthier. En effet, il obtint en 1866 un spectre composé de raies. Cela lui permit de prouver que les aurores ne pouvaient être générées par des réflexions, ni par des particules solides ou liquide, ni par des particules incandescentes. La raie la plus intense obtenue fut le jaune vert soit une mesure de 5567 Angström (soit 556,7 nanomètres) même si à l’époque cette unité de longueur n’existait pas. Cette découverte permit à de nombreux physiciens d’étudier les couleurs des aurores, afin de déterminer les différentes particules qui entrent en jeu dans ce phénomène.

 

Auguste de la Rive émit une théorie en 1862 selon laquelle les aurores boréales seraient dues à des décharges électriques générées par différents phénomène de condensation au niveau des pôles. Selon lui, ces phénomènes de condensation étaient à mettre en relation avec des flux électriques qui voyageaient de l’équateur vers les pôles grâce aux vents de haute altitude. Il essaya de construire un appareil permettant la création d’aurores basé sur la création d’arcs électriques autour d’un barreau aimanté. Ce fut la première approche de la modélisation de la dynamo terrestre.

Nous pouvons encore retrouver cette machine au musée des Arts et Métiers de Paris et au musée d’Histoire des Sciences de Genève.

 

Selim Lemström (1838-1904), un géophysicien finlandais, mit au point une machine permettant de donner une représentation lumineuse assez fidèle à celle d’une aurore. Pour cela, il utilisa une boule creuse en laiton, isolée, hérissée de pointes, et, face à ces pointes, il plaça dix tubes Geissler (proches de nos tubes au néon modernes) reliés à la terre. Lors de la mise en marche de l’appareil, un phénomène lumineux qui ressemblait à une aurore se développa dans les tubes.

 

Lors des années 1882-1883, la première année polaire internationale eut lieu et Sophus Tromholt (1852-1896), un astrophysicien danois, dirigeait l'un des deux observatoires installés en Laponie spécialement pour observer les aurores. L’accumulation de ces observations lui permit lui-aussi de mettre en évidence la relation entre les taches solaires et le nombre d’aurores. Il étudia par ailleurs les relations entre les aurores et les coupures de liaison télégraphique, et notamment dans la zone aurorale.

 

Le physicien norvégien Olaf Christian Bernhard Birkeland (1867-1917) fut le premier physicien à mettre en évidence l’existence de l’électron. Il fut également le premier à émettre l’hypothèse selon laquelle les aurores boréales étaient créées à la suite de l’émission d’un flux d’électrons en provenance du Soleil qui serait piégé dans la magnétosphère terrestre. Non seulement la supposition de l'électron était juste, mais son hypothèse sur la formation d'une aurore s'avéra véridique. Il effectua de nombreuses expériences afin de vérifier sa théorie. Sa plus célèbre consista à projeter des électrons à travers un champ magnétique dipolaire. Ces électrons se dirigèrent à l’intérieur d’une sphère qui devenu fluorescente : son expérience fut un succès, le résultat obtenu ressembla fortement à une aurore. Il nomma cette machine à simuler les aurores la Terrella.

 

En 1910, les travaux de Birkeland furent repris par Carl Störmer (1874-1957), mathématicien et physicien norvégien. En effet, il étudia la trajectoire d’un unique électron projeté par le Soleil vers la Terre avec pour unique influence celle d’un champ magnétique dipolaire. Störmer est aussi le premier scientifique à fournir les premières mesures précises de l’altitude des aurores. À la suite de conversations téléphoniques avec son assistant, il réalisa des mesures par triangulations des photographies et il en conclut que les aurores observées se situaient à au moins 80 kilomètres de la Terre. Cette affirmation infirma les observations du siècle précédent avec notamment les écrits de l’astronome Camille Flammarion : « Les aurores se passent à toutes les hauteurs. D’après les mesures de Bravais (un des scientifiques présent lors de l’expédition au Spitzberg), leur élévation ordinaire serait comprise entre 100 et 200 kilomètres. D’après celles de Loomis, le point extrême d’où les fusées sont dardées atteindrait 700 et 800 kilomètres ! Elles s’effectueraient ainsi dans l’atmosphère supérieure dont nous avons parlé au commencement de cet ouvrage. On en a mesuré toutefois qui étaient beaucoup plus basses et descendaient à la hauteur des nuages Â».

 

Bien que les théories de Birkeland et de Störmer furent beaucoup modifiées par la suite, la plus grande partie de leurs recherches et de leur travail ont perdurés ; notamment leurs méthodes d’observations et la classification des orages magnétiques par Birkeland.

 

Aujourd’hui les principales recherches sur les aurores polaires en France sont effectuées au laboratoire de physique de l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG) où travaille notamment l’astronome et planétologue Jean Lilensten. Il a conçu avec ses collègues la Planeterrella qui est une amélioration de la Terrella de Birkeland. Elle permet de simuler des aurores dans plusieurs configurations, et de montrer les interactions entre deux planètes (c'est à dire la façon dont se répartit les faisceaux électromagnétiques entre les champs magnétiques des deux planètes).

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